INDO-CHINE 1949 /1956
L'arrivée d'un marsouin parachutiste de 18 ans en « Indo »... première journée !

SS Pasteur

Après 18 jours de mer le « SS pasteur, transport de troupe avec 6.000 hommes à bord, arrive le 6 décembre 1949 en vue des cotes de Cochinchine pour débarquer, a saï-gon, destination du groupe de commandos n° 2 (GC2) du 1er bataillon de commando coloniaux de parachutistes.

Nous sommes transbordés avec armes et sacs sur un navire a destination du port de saï-gon. La rivière de saï-gon est le fleuve qui relie la mer a la capitale ; son tirant d'eau est suffisant pour des gros cargos ; trois heures sont nécessaires pour ce voyage à marée haute.

La mangrove nous environne de bâbord a tribord ,deux ou trois coups de fusil nous mettent dans l'ambiance et nous apprécions...l'utilité des plaques blindées ,disposées autour du bastingage .
Dès l'accostage, le débarquement du GC2 commence ; les GMC font le plein et l'unité traverse rapidement la ville en nous laissant, entrevoir... trop rapidement les Co gai dans leur chatoyante tenue .Passons sur les commentaires ?....
A la sortie de la ville l'atmosphère change ; traversée du pont de binh-loi, gardé par une troupe franco-annamite bien armée, des blockhaus, des barbelés partout et sur le fleuve en contre bas nous apercevons des petits patrouilleurs (LCT).
La petite ville de THU-DUC, PC du commandant de la région nord (22ème RIC) est vite traversée, nous prenons une route a gauche avec un aperçu sur une piscine ou barbote plein de baigneurs ; la guerre n'est, semble –t-il, pas pareille pour tous...la route ressemble plutôt a une piste et les bahuts ne semblent pas éviter les trous ; plusieurs tours de défense sont en construction (Le responsable de la construction de ces tours était l'adjudant-chef Pouzergues, membre de l'ATDM34, et c'est seulement 60 ans après que je l'ai découvert lors d'une visite chez lui) avec des petites unités, en protection.
LAI-THIEU, notre destination, gentille petite ville est vite derrière-nous et nous apercevons des constructions dominées par un drapeau tricolore, enfin chez-nous ? C'est une grande briqueterie ou de nombreux bérets rouges s'activent ; pour eux la relève arrive. Après 27 mois de séjour, de nombreux camarades manquent à l'appel, mais le moral semble bon.
le 2ème BCCP a été engagé dans de multiples opérations (sud-centre et nord ) nous sommes prêts a les relever dignement.
Les consignes sont passées à tous les échelons et à notre niveau les gars du 2 ne se gênent pas pour nous filer les « jetons ». Ils embarquent dans les GMC destination saï-gon et...le bateau !
les ordres d'installation, lieu de vie, postes de combat, gardes, nous ramènent a notre mission.
Surprise ! Un excellent repas du soir, préparé par le BEP (cuisinier local) est un cadeau des anciens : bravo à la famille de la 1/2 brigade para, et merci !
La nuit tombe vite et après avoir reçu nos compléments de munitions, nous regagnons, très excités nos emplacements. Quelle nuit !... le fonctionnaire caporal, que je suis, va recevoir une leçon qui l'accompagnera pendant toute sa carrière militaire.
De garde à une arme automatique, de 2 h. a 4 h, somnolant un peu j'ai été ramené a la réalité par un violent coup de pied donné par le sous officier de quart ; sortie de mon emplacement ,il m'a mis dans chaque main ,une grenade défensive MK3 ,a enlevé les goupilles , me recommandant de bien les tenir et, m'a envoyé à 100 mètres, au ras des barbelés me prévenant qu'il prenait ma place a la 7.62 et qu'a la moindre explosion ,il rafalait ; au bout d'une 1/2 heure il est venu me remettre les goupilles et j'ai terminé ma garde . La leçon a été bonne car durant mes 8 années de guerre, je n'ai jamais plus fermé les yeux de garde, de quart ou en embuscade.

Jacques BOUTHIER